Amélie Poulain, croque la vie
Quel beau film ! Agir sur la vie quotidienne pour ne plus la laisser agir sur soi, être un acteur de la vie et non plus un spectateur. Il faut descendre des gradins pour pénétrer dans la fosse et si possible monter sur scène, la scène de la Vie où tous devraient se trouver. Chacun sera surpris lorsqu’il se rendra compte que de penser aux autres, ne s’intéresser qu’aux autres en s’ignorant ( en fait être accompli ) nous amène mille fois plus de « choses » que nous ne pourrons jamais donner. Dans les dialogues avec ses congénères, pour ne pas les étouffer, il faut se mettre à leur niveau ou juste un peu en dessous. Il ne faut surtout pas provoquer brutalement le dialogue car la brutalité bloque rapidement toute conversation, il faut préparer le terrain, patiemment, ne pas brusquer ce terrain fertile sur lequel on « sèmera » la discussion.
Ne pas être trop matérialiste (voire plus du tout) nous permet de prendre ses distances avec les problèmes quotidiens mais bien sûr on ne peut le faire que quand on n’en a pas ( il est toujours plus facile de parler de la faim dans le monde quand on a le ventre plein ). Les problèmes matériels ajoutés à d’autres (physiques et surtout psychiques) prennent toute notre énergie. Comme le père d’Amélie Poulain, ne se focaliser que sur un nain de jardin tandis qu’un monde entier nous attend, les bras ouverts, équivaut à reculer en permanence et l’on se retrouvera un jour dos au mur. Il faut nous engouffrer dans la Vie, la mordre à pleines dents, car sinon ce sera elle qui nous mangera .Telle une mante religieuse, cette vie nous séduit jusqu’à ce que … mais surtout ne lui tournez pas le dos car sinon elle vous croquera, d’un coup.
Il faut la mériter et ne pas baisser les yeux ni le dos : elle nous donnera mille choses si nous le lui demandons mais pour cela il faut la mériter.
Se battre comme un Don Quichotte nous épuisera et nous deviendrons des zombis de la Vie, il faut se ressaisir pour ne pas être enterré vivant.